mardi 10 décembre 2013

ESAZLESA [CZ] - KARACHI @ L'OUKAZE, BEGLES, FR - 10/12/2013

Moi ce soir je voulais aller voir Casse-Tête Chinois, la suite de l’Auberge Espagnole et des Poupées Russes. Mais Maxence, lui, il voulait aller voir du screamo tchèque dans un squat. Chacun ses goûts, me disais-je en montant dans sa voiture. Direction Bègles. 

En lieu et place de voir Romain Duris m’expliquer quel genre de loser je serais à 30 ou 40 ans, on va s’encanailler à l’Oukaze (« l’équivalent d’un décret du temps de l’empire Russe », me souffle ma mémoire googlelienne), grande demeure de style anglaise squattée depuis mars dernier. Sur l’imposant portail est collée une affiche, proclamant niquer à peu près tous les corps de police. Alors que l’on passe la porte de la bâtisse, je remarque un innocent « SATAN » gribouillé au marqueur sur la tranche. L’entrée est à prix libre, donc personne à la « caisse » mais un panneau expliquant le concept à ceux qui y seraient peu familiers. J’aime bien cette attitude, limite pédagogique. Ça change de la condescendance qu’on peut parfois rencontrer dans les milieux anars. 

Le lieu est doubleplusbon. Les murs sont couverts de fresques, toiles et autres slogans. Le tapis sonore entre les sets se résume à une chaîne hifi défoncée et les lights à une lampe tamisée. On est dans un grand salon, quoi. 

Alors que le feu se meure dans la cheminée, ce sont les français de KARACHI qui commencent (enfin ils sont de Mont de Marsan mais t’as compris, m’emmerde pas). Et ça tient beaucoup à la Rickenbaker du guitariste, mais wow, ils ont un son de malade, hyper saturé. Leur hardcore me fait un peu penser à du CONVERGE, surtout sur les passages rapides ; le chanteur est hyper nerveux et balance des high kicks dans tous les sens. Hélas le set est bien trop court, je me serais bien repris trois ou quatre morceaux de plus. Par contre, ils appartiennent à la secte de ceux qui ne sortent leur musique qu’en cassette. Les vinyles encore, je peux comprendre : c’est contraignant, certes, il faut un lecteur dédié et tout, mais ce sont de très beaux objets. Une cassette, en plus d’avoir aussi plein de contraintes, ben c’est moche et vraiment personne n’a de lecteur. Donc voilà mon grand message : quitte à sortir un album ou un EP sur un support inhabituel, faites-le sur vinyle (quoi ? les coûts supplémenquoi ?). 

Les ESAZLESA sont peut-être un peu trop nombreux pour ce lieu : trois guitaristes, un batteur qui doit aussi pouvoir atteindre un clavier, un bassiste massif et encore un mec qui gère quelques programmations et les visuels projetés sur le mur derrière le groupe. De gros néons blancs sous leurs baffles baignent la pièce dans une atmosphère toute différente du premier groupe. Ils font très pro, ce qui dans ce lieu particulier donne l’impression de jouer dans un clip.
ESAZLESA jouent donc du screamo ; tous les musiciens ont un delay et c’est la fête de la reverb. Le son est tout à fait correct. Et c’est une putain de baffe. Genre bim, quoi. Dans le hardcore, l’esthétisme n’est pas toujours le but recherché ; les mélodies s’effacent devant l’intensité et la violence. Là, c’est tout simplement beau. J’en suis essoufflé. Devant moi, le bassiste fend l’air avec son instrument en permanence à quelques centimètres de mon nez ou de mon derrick de procréation, me faisant baigner dans un sentiment d’insécurité constant. Le batteur est complétement ahurissant, avec des patterns très complexes, bousculés, originaux. On a parfois l’impression qu’il est hors-tempo avant de le voir retomber sur ses pattes à tous les coups. Le groupe assume une démarche très visuelle, avec donc de petites vidéos projetées, en phase avec la musique. Ça apporte beaucoup à l’ambiance et si ça peut passer pour de l’esbroufe, je trouve que ça dénote d’une vraie recherche artistique. Et j’aime les vraies recherches artistiques. Oui, j’aime.
Le set est encore une fois beaucoup trop court à mon goût. Dommage. Ils ont en tout cas gagné un fan, tout comme l’Oukaze, lieu que j’espère voir perdurer le plus longtemps possible. Merci aux groupes et merci à Vaincre la Nuit pour l’orga. 

**Marc Tranchant**

2 commentaires:

  1. Les cassettes ne sont pas moches, elles ont un physique discutable et tous les goûts sont dans la nature comme en témoignent les choix de prénoms que nos parents ont fait pour nous.
    Un rapide calcul d'expert t'aura permis de constater qu'en effet produire un EP en cassette revient probablement 400 fois moins cher qu'en vinyle, mais le véritable intérêt pour nous a été d'esquiver les joyeux drilles de la SACEM et de permettre aux nostalgiques possesseurs de radio-cassettes (qui existent) de copier et partager l'enregistrement gratuitement et sans enfreindre la loi. De plus les enregistrements sont DIY et nous autres adeptes de la photocopieuse et des attaches parisiennes savons apprécier la possibilité de produire un album en mangeant des gâteaux dans notre salon.
    Nous ne sommes pas une secte et j'en détiens la preuve puisque j'ai des photos montrant que nous avons des rapports normaux avec les animaux, et qu'en plus nous savons utiliser bandcamp et mettre des mp3 en ligne et en téléchargement gratuit.

    Vraiment si on avait simplement voulu faire un truc original on aurait au moins utilisé un pigeon, des nachos et un maximum de foin.

    Et si on a le droit d'être péremptoire ici alors j'en profite pour dire que le riz au lait c'est dégueulasse et que personne de normalement constitué ne devrait pouvoir digérer ça. Bisous et bravo pour cette chronique quand même !

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    1. Exactement, le riz au lait c'est dégueulâsse. Le riz ça se mange blanc, dans un bol et avec des baguettes, point barre.

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