Moi ce soir je voulais aller voir Casse-Tête Chinois, la suite de
l’Auberge Espagnole et des Poupées Russes. Mais Maxence, lui, il voulait
aller voir du screamo tchèque dans un squat. Chacun ses goûts, me
disais-je en montant dans sa voiture. Direction Bègles.
En lieu
et place de voir Romain Duris m’expliquer quel genre de loser je serais à
30 ou 40 ans, on va s’encanailler à l’Oukaze (« l’équivalent d’un
décret du temps de l’empire Russe », me souffle ma mémoire
googlelienne), grande demeure de style anglaise squattée depuis mars
dernier. Sur l’imposant portail est collée une affiche, proclamant
niquer à peu près tous les corps de police. Alors que l’on passe la
porte de la bâtisse, je remarque un innocent « SATAN » gribouillé au
marqueur sur la tranche. L’entrée est à prix libre, donc personne à la «
caisse » mais un panneau expliquant le concept à ceux qui y seraient
peu familiers. J’aime bien cette attitude, limite pédagogique. Ça change
de la condescendance qu’on peut parfois rencontrer dans les milieux
anars.
Le lieu est doubleplusbon. Les murs sont couverts de
fresques, toiles et autres slogans. Le tapis sonore entre les sets se
résume à une chaîne hifi défoncée et les lights à une lampe tamisée. On
est dans un grand salon, quoi.
Alors que le feu se meure dans la
cheminée, ce sont les français de KARACHI qui commencent (enfin ils sont
de Mont de Marsan mais t’as compris, m’emmerde pas). Et ça tient
beaucoup à la Rickenbaker du guitariste, mais wow, ils ont un son de
malade, hyper saturé. Leur hardcore me fait un peu penser à du CONVERGE,
surtout sur les passages rapides ; le chanteur est hyper nerveux et
balance des high kicks dans tous les sens. Hélas le set est bien trop
court, je me serais bien repris trois ou quatre morceaux de plus. Par
contre, ils appartiennent à la secte de ceux qui ne sortent leur musique
qu’en cassette. Les vinyles encore, je peux comprendre : c’est
contraignant, certes, il faut un lecteur dédié et tout, mais ce sont de
très beaux objets. Une cassette, en plus d’avoir aussi plein de
contraintes, ben c’est moche et vraiment personne n’a de lecteur. Donc
voilà mon grand message : quitte à sortir un album ou un EP sur un
support inhabituel, faites-le sur vinyle (quoi ? les coûts supplémenquoi
?).
Les ESAZLESA sont peut-être un peu trop nombreux pour ce
lieu : trois guitaristes, un batteur qui doit aussi pouvoir atteindre un
clavier, un bassiste massif et encore un mec qui gère quelques
programmations et les visuels projetés sur le mur derrière le groupe. De
gros néons blancs sous leurs baffles baignent la pièce dans une
atmosphère toute différente du premier groupe. Ils font très pro, ce qui
dans ce lieu particulier donne l’impression de jouer dans un clip.
ESAZLESA
jouent donc du screamo ; tous les musiciens ont un delay et c’est la
fête de la reverb. Le son est tout à fait correct. Et c’est une putain
de baffe. Genre bim, quoi. Dans le hardcore, l’esthétisme n’est pas
toujours le but recherché ; les mélodies s’effacent devant l’intensité
et la violence. Là, c’est tout simplement beau. J’en suis essoufflé.
Devant moi, le bassiste fend l’air avec son instrument en permanence à
quelques centimètres de mon nez ou de mon derrick de procréation, me
faisant baigner dans un sentiment d’insécurité constant. Le batteur est
complétement ahurissant, avec des patterns très complexes, bousculés,
originaux. On a parfois l’impression qu’il est hors-tempo avant de le
voir retomber sur ses pattes à tous les coups. Le groupe assume
une démarche très visuelle, avec donc de petites vidéos projetées, en
phase avec la musique. Ça apporte beaucoup à l’ambiance et si ça peut
passer pour de l’esbroufe, je trouve que ça dénote d’une vraie recherche
artistique. Et j’aime les vraies recherches artistiques. Oui, j’aime.
Le
set est encore une fois beaucoup trop court à mon goût. Dommage. Ils
ont en tout cas gagné un fan, tout comme l’Oukaze, lieu que j’espère
voir perdurer le plus longtemps possible. Merci aux groupes et merci à
Vaincre la Nuit pour l’orga.
**Marc Tranchant**
Les cassettes ne sont pas moches, elles ont un physique discutable et tous les goûts sont dans la nature comme en témoignent les choix de prénoms que nos parents ont fait pour nous.
RépondreSupprimerUn rapide calcul d'expert t'aura permis de constater qu'en effet produire un EP en cassette revient probablement 400 fois moins cher qu'en vinyle, mais le véritable intérêt pour nous a été d'esquiver les joyeux drilles de la SACEM et de permettre aux nostalgiques possesseurs de radio-cassettes (qui existent) de copier et partager l'enregistrement gratuitement et sans enfreindre la loi. De plus les enregistrements sont DIY et nous autres adeptes de la photocopieuse et des attaches parisiennes savons apprécier la possibilité de produire un album en mangeant des gâteaux dans notre salon.
Nous ne sommes pas une secte et j'en détiens la preuve puisque j'ai des photos montrant que nous avons des rapports normaux avec les animaux, et qu'en plus nous savons utiliser bandcamp et mettre des mp3 en ligne et en téléchargement gratuit.
Vraiment si on avait simplement voulu faire un truc original on aurait au moins utilisé un pigeon, des nachos et un maximum de foin.
Et si on a le droit d'être péremptoire ici alors j'en profite pour dire que le riz au lait c'est dégueulasse et que personne de normalement constitué ne devrait pouvoir digérer ça. Bisous et bravo pour cette chronique quand même !
Exactement, le riz au lait c'est dégueulâsse. Le riz ça se mange blanc, dans un bol et avec des baguettes, point barre.
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